Carlos Drummond, Directeur de Recherche au Centre de Recherche Paul Pascal (CRPP) depuis 20 ans, est l’un des fondateurs du projet Carbon Waters. Il revient dans cette interview sur son parcours et ce qui l’a amené à lancer l’aventure Carbon Waters.
Vous êtes directeur de Recherche au Centre de Recherche Paul Pascal (entité du CNRS) depuis 20 ans ?
Carlos Drummond : C’est exact, je suis d’origine vénézuélienne et suis arrivé en France il y a 20 ans, en 2003, au CNRS. Suite à mes études au Venezuela, j’ai réalisé ma thèse en Californie, à l’Université de Californie, à Santa Barbara, puis j’ai travaillé quelques années en Recherche & Développement chez Petróleos de Venezuela (PDVSA) avant d’être recruté au CNRS (plus précisément au Centre de Recherche Paul Pascal – CRPP) à Pessac.
Pourquoi vous être orienté vers la recherche académique ?
CD : La recherche industrielle et la recherche académique sont très distinctes. En industrie, le but premier de la recherche est d’aboutir à un produit commercialisable, sinon, il est difficile pour l’entreprise de survivre. On a rarement le temps d’approfondir les sujets pour arriver à une compréhension plus complète des systèmes. C’est donc difficile pour moi de me projeter et de rester motivé. C’est pour cela que j’ai souhaité explorer la voie de la recherche académique. Ce qui me plaît, c’est d’avoir plus le temps de la réflexion sur un projet, de pouvoir faire plus d’expérimentations. En tant que Directeur de Recherche au CRPP, j’encadre des doctorants et je mets mes connaissances scientifiques à leur service. C’est un rôle qui me correspond beaucoup mieux et dans lequel je m’épanouis pleinement.
En quoi consistent vos travaux de Recherche au CRPP ?
CD : Je travaille sur la mesure des forces d’interaction entre deux objets (par exemple, les forces de frottement), afin de déterminer d’où elles proviennent. Si on prend l’exemple du graphène, on sait qu’il y a une interaction entre deux feuillets. Si l’on comprend l’origine de ces interactions, on peut développer des stratégies pour les maîtriser, afin d’éviter qu’ils ne s’agrègent dans un solvant, pour que l’ensemble reste bien homogène.
Vous êtes à l’origine du projet Carbon Waters…
CD : Au départ, en 2007, c’est avec Alain Pénicaud, également directeur de Recherche au CRPP que nous avons eu l’idée de produire du graphène, matériau tout juste découvert à l’époque. Vers 2014-2015, nous avons compris que le projet avait de réelles perspectives et qu’il fallait le concrétiser en passant au statut d’entreprise. Le CNRS nous a accompagnés dans cette phase de « prématuration », afin de dépasser le stade de la fiole de quelques millilitres. Cependant, nous nous sommes vite rendu compte que l’entreprenariat est un métier à part entière, qui demande un investissement à 100% et des compétences bien précises. Or, Alain et moi n’avions pas pour idée d’abandonner notre travail passionnant de Directeur de Recherche…
Et c’est à ce moment-là que vous croisez la route d’Alban Chesneau…
CD : Exactement, nos chemins, ou plutôt ceux d’Alain et d’Alban se sont croisés pile au bon moment. Alban avait une vision très claire de comment passer du projet en labo à une vraie entreprise. Il a tout de suite saisi le potentiel de ce projet entrepreneurial. De façon gracieuse, il nous a aidé en nous donnant beaucoup de conseils et a même décidé au bout de quelques temps de quitter son poste, bien placé en plus !, pour s’investir pleinement dans le projet Carbon Waters. C’est quelqu’un d’extraordinaire ! Sans lui, Carbon Waters n’aurait jamais vu le jour.
Que pensez-vous du chemin parcouru par Carbon Waters depuis ses tout débuts ?
CD : Je suis sidéré de la vitesse à laquelle Carbon Waters a su se développer et continue de le faire. Près de 95% des start-up ne survivent pas plus de 2 ans. Passer ce cap relève déjà de l’exploit. Carbon Waters a su s’adapter à son environnement et surtout être précurseur sur les domaines d’applications de ses additifs de performance à base de graphène, en s’adressant aux marchés dont les besoins sont réels sur les sujets de décarbonation ou de durabilité des matériaux par exemple. Au départ, ce sont des sujets auxquels Alain et moi n’avions même pas pensés. Chaque fois que je passe dans les locaux de Carbon Waters, je découvre de nouvelles améliorations ou pistes envisagées. C’est une jeune entreprise dynamique, innovante, qui ne se repose pas sur ses acquis.
Et aujourd’hui, vous êtes toujours en lien avec Carbon Waters ?
CD : Bien sûr, je fais partie des actionnaires de Carbon Waters et j’apporte également mon concours scientifique à l’entreprise. Je peux par exemple être amené à conseiller l’équipe sur des sujets bloquants ou les aider à résoudre certains problèmes. Je suis très heureux d’accompagner Carbon Waters et souhaite continuer à faire partie de cette belle aventure dans les années à venir.